Offertoire pour les fêtes de la Sainte-Vierge, op.10

L’OFFERTOIRE POUR LES FETES SIMPLES DE LA SAINTE VIERGE fait chanter l’Ave Maris Stella du 1er mode des vêpres du commun des fêtes de la Sainte Vierge, en l’entrecoupant de l’O Clemens du Salve Regina ton simple. Citations littérales discrètement et délicatement harmonisées et revêtues des couleurs successives des cromorne, flûte, cor de nuit et quintaton.

Choral-prélude pour le temps de l’Avent, op.31

Décembre 1940

Humblement, sous la forme d’un prélude-choral, le musicien joint sa voix à celle de tous ceux qui, dans le recueillement des cathédrales et des abbayes, depuis des siècles, préparent Noël en priant sur les incomparables mélodies grégoriennes.

La première phrase s’inspire de la mélodie des sept grandes antiennes des sept jours précédant Noël, dites antiennes O, car commençant toutes par cette interjection. « O Sapientia… », « O Sagesse du Très-Haut, viens nous instruire… viens nous libérer… viens nous sauver ». Sur le cornet, les variations d’un choral orné mettent en valeur l’expressivité du thème grégorien. A cet appel, la deuxième phrase ajoute sa voix sur le cromorne : « Creator alme siderum… », « Créateur des étoiles, nous te prions… » (hymne des vêpres des dimanches de l’Avent).

La méditation reprend avec le retour du thème « O Sapientia ». Sur les jeux de fonds, l’appel se fait plus insistant. Nouvelle réponse consolante du « Creator alme siderum » sur le cromorne. Ce choral de l’attente s’achève sereinement sur un « O Sapientia » chanté en valeurs égales dans la limpidité de flûtes, gambe et voix céleste, avec des dessins imitatifs des divers motifs.

Sacerdos et pontifex, op.16

1933

Autrefois, l’antienne grégorienne « Sacerdos et Pontifex » était chantée pour l’accueil de l’évêque dans sa cathédrale. A Notre-Dame de Paris, l’arrivée du cardinal-archevêque pour les grandes cérémonies était grandiose. Deux suisses en grande tenue, hallebarde sur l’épaule, précédaient une longue procession : chanoines revêtus de leur camail, enfants de la maîtrise, cérémoniaire, clergé, le cardinal enfin, mitré, une magnifique crosse à la main, revêtu de la cappa magna, longue chape violette suivie d’une longue traîne.

Ecrite pour s’accorder à un tel cérémonial,. Saint-Martin fait appel à 4 voix mixtes, 3 trompettes, 3 trombones et orgue. Musique majestueuse d’un grand effet décoratif.

Versets pour les fêtes

(Voir le catalogue des œuvres)

Ces versets n’avaient d’autre ambition que de s’insérer dans le déroulement des offices de Notre-Dame de Paris. D’ailleurs Saint-Martin ne les avait pas inscrites dans la liste de ses œuvres, les élans de l’inspiration et les idées de composition devant le céder aux impératifs liturgiques.

Certaines de ces pièces constituent assurément la restitution d’improvisations. Dans toutes, on reconnait le lyrisme de leur auteur et son art de la couleur utilisant toutes les ressources de l’instrument. On fuit les effets romantiques ; on laisse la place d’honneur aux thèmes grégoriens. Elles sont un précieux témoignage de la façon dont il concevait son rôle d’organiste liturgique : souci d’être compris pour que la musique transmette la louange et la prière, soin apporté à s’ajuster exactement à l’esprit des offices.

Toccata et Fugue de la Résurrection, op.38

Septembre 1945

Le thème du psaume « Illuxit tertia die « de Benedetto Marcello constitue le sujet de la fugue, cette forme permettant de le respecter à la lettre tout en le mettant en valeur dans ses passages d’une voix à l’autre et dans ses réexpositions en diverses tonalités. A Notre-Dame, ce psaume était souvent chanté à l’issue des cérémonies de Pâques.

L’auteur demande que, lorsque cet « Illuxit « n’est pas chanté, cette fugue soit précédée d’une toccata de façon à éviter l’effet réducteur de l’énoncé à vide du sujet. Brève, bien sonnante, ses effets relativement faciles veulent simplement, en prédisposant l’attention des auditeurs, mettre en valeur l’exposition solitaire du sujet et l’enchaînement des réponses, des contre-sujets et des réexpositions.

A la gloire de Saint-Louis, op.33

Août 1945

Cette œuvre, écrite pour orgue, et trois trompettes trois trombones ad libitum, fut donnée en première audition par Pierre Moreau, le 10 novembre 1946 à la salle Pleyel.

C’est une variation sur deux thèmes assez proches, l’un provenant d’une antienne des laudes de l’office de Saint Louis propre à la France, le second reproduisant une mélodie béarnaise.

Prélude et variation sur « Venez divin Messie », op.32

Décembre 1940

Le thème de ce populaire noël se laisse d’abord deviner dans de longues valeurs égales au pédalier, qui montent ensuite au milieu du clavier, puis à l’aigu, chaque fois dans une tonalité éloignée. Lents appels dans un crescendo insistant. Le rythme vif de dessins imitatifs, l’augmentation du nombre de voix annoncent la claire expression dans son rythme véritable du « Venez, venez » qui apparaît enfin, dansant sur de légers staccatos. Il passe de clavier en clavier, de plus en plus allant grâce à la rapidité des traits et aux changements de rythme. Dans un mouvement inverse de celui de la première partie, on part de l’aigu pour revenir au pédalier. Puis le thème est réexposé en force, soutenu de larges arpèges, affirmation victorieuse de la certitude du salut, et assurément pour les auditeurs de décembre 1940, grandiose chant d’espoir.

Cantique paraphrase, op.30

15 août 1940

Ce Cantique-Paraphrase est une suite de variations sur le cantique très populaire à l’époque « O Marie, ô Mère chérie ». Le thème, grandiloquent comme l’étaient maints cantiques, ne prêtait guère à de grandes finesses. On imagine plutôt qu’après qu’il eut été clamé par une foule, le grand orgue en tirait les effets d’une sortie tonitruante.

Les mélodies

SIX ESQUISSES PARISIENNES

Six mélodies qui chantent Paris sur des vers d’une comtesse de Curial.

1. Paris d’avril : c’est « le printemps enjôleur… Laissez-vous enjôler, midinettes agiles ».

2. Grisaille : « C’est un coin de Paris, vieillot, il en existe,… un coin tout triste ».

3. Mariez-vous : « Quand on est coquette, En courant la ville… »

4. Cimetière de Paris : « … s’endort le cimetière Forçant ces agités à rester bien tranquilles ».

5. L’heure du thé : « Comme on est bien tous deux près du feu qui pétille… « 

6. Vampire : « L’erreur amère… De ne pouvoir durer, d’être enterré trop tôt ».

L’ENFANT

Mélodie non datée, toute de clarté et d’innocence. Et d’envol, comme la poésie de la comtesse de Montebello qui lui sert de support et qui compare l’enfant à un « oiseau d’amour, reflet du ciel mystérieux ».

HYMNE A LA TRES CHERE op. 13, 1932

Sur la célèbre poésie de Baudelaire, « A la très chère, à la très belle… », en 12/8 et en mode lydien, pleine d’allant, sans l’ombre d’une ombre, c’est une très directe déclaration d’amour.

SUR LES BALCONS DU CIEL op. 14, 1932

– Midi de Leconte de Lisle : « Midi, roi des étés, épandu sur la plaine… »  Un piano aux traits larges, puis plus serrés, adhère au texte.

– Novembre d’un certain Pierre Guitet-Vauquelin : « La vague fastueuse des pourpres et des ors… » Une procession d’accords s’anime pour exprimer « l’inquiétude exquise » de ce mois.

– Hiver d’Albert Samain : « Le ciel pleure ses larmes blanches… » Il est demandé au chanteur « une teinte d’infinie mélancolie » traduite par le jeu tantôt harmonique, tantôt mélodique, de tierces mineures.

Ivresse au printemps d’Anne de Noailles : « Printemps léger, crispé, charnu… » Un lumineux et joyeux ré majeur enveloppe un air d’allure presque populaire. Des trilles et arpèges font chanter les oiseaux avant qu’une suite de modulations ne ramène, comme une ritournelle, le ton initial.

ESQUISSE MUSICALE SUR UN POEME DE TRISTAN KLINGSOR Août 1945

L’intimité d’une confidence cachée derrière ce titre écran. Tendue, mais soulevée par instants d’un élan passionné, sans aucun effet pianistique, la succession d’accords systématiquement de quatre notes sonne la perspective implacable de « mon heure pour toujours révolue ». Note polaire, un mi obsessionnel, impose son mode mélancolique.

Magnificat, op.42

1950-1951

A Notre-Dame de Paris, le Magnificat qui conclut les vêpres était chanté en alternance : un verset psalmodié par le chœur, un verset improvisé à l’orgue.

Le Magnificat pour 4 voix mixtes et deux orgues reprend cet échange chœur-orgue. Les choristes chantent l’intégralité des douze versets, les interludes du grand orgue figurent une sorte de deuxième chœur, résonateur lyrique préparant ou faisant écho aux interventions des voix.

La variété des idées et des sentiments exprimés dans ce Cantique de la Vierge, imposait de concevoir un facteur d’unification si l’on voulait éviter la dispersion et le morcellement de l’expression musicale. L’inspiration de Saint-Martin, ou plutôt le fruit de sa méditation, semble avoir été que chanter le Magnificat, c’est chanter l’immense vénération que l’on doit à la Mère de Dieu, mais aussi chanter la louange due au Sauveur pour un tel don. Chanter le Magnificat, c’est donc chanter « Salve Regina », et, en consonance avec Marie, chanter le « Te Deum ». Or les mélodies grégoriennes ton simple du Salve et du Te Deum sont apparentées. L’inspiration a donc été d’utiliser les premières notes de ces mélodies pour en faire le thème principal qui parcourt l’œuvre, et, concentrées harmoniquement, d’en faire une sorte d’accord-thème qui apparaîtra à plusieurs reprises. A partir de là, s’engendrent les diverses transformations thématiques et  harmoniques.

Joie débordante de l’introduction que suit l’exultation harmonique et rythmique d’un interlude du grand orgue avant le chant presque dansant de l’« Exultavit ». Après quoi le grand orgue se fait plus grave, méditatif, comme pour aller plus avant dans cet événement incroyable, une fille d’Eve portant en elle la gloire de Dieu ! Et crescendo, le grand orgue sur un rythme à nouveau presque dansant, nous conduit à un déploiement éclatant de la mélodie du Te Deum par le chœur à l’unisson.

Contraste immédiat : pianissimo, le grand orgue dilue et métamorphose ce thème et le chœur fait entendre le thème que l’on pourrait dire de l’Amour miséricordieux. Crescendo du grand orgue vers une nouvelle affirmation de la puissance divine, relayée par le chœur « fecit potentiam ». Une fugue vigoureuse en rupture de style au beau milieu de l’œuvre (110 mesures avant la fugue, 107 mesures après), produit une sorte de vide harmonique au sein duquel  la dispersion des notes figure la dislocation de la suffisance des orgueilleux : « dispersit superbos », « potentiam fecit ».

Pianissimo, s’élève la flûte 8’ du grand orgue. L’orgue de choeur intervient, les deux orgues se répondent harmonieusement. Au-dessus de ce dialogue, les soprani viennent chanter la promotion des humbles ; puis les ténors chantent le rassasiement des pauvres ; les alti, l’amour paternel du Seigneur ; toutes les voix se réunissent enfin pour proclamer que, depuis toujours, le Seigneur l’avait annoncé. Un rythme, une dynamique et des modulations de plus en plus intenses soulignent cette progression qui débouche sur le « Gloria Patri ». Annoncé au grand orgue dans un crescendo triomphal, le chœur le reprend avant un « sicut erat » presque euphorique.

Et, dans l’écho du dernier accord, monte très recueilli, au grand orgue, puis à l’orgue de chœur, puis au chœur lui-même, le chant de l’Amour miséricordieux qui conclut l’œuvre. « Salve Regina, mater misericordiae ».